DE LA STABILITÉ DES DOTATIONS DE L’UNION EUROPÉENNE POUR LES REGIONS ULTRAPERIPHERIQUES

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L’UNION EUROPÉENNE opérant sur la base d’une programmation budgétaire pluriannuelle,la Commission Européenne n’as pas tardé à faire connaitre dès le mois de juin dernier pour la période prochaine 2021 à 2027, une proposition d’abaissement du Budget de la Politique Agricole Commune (la PAC), un plan de nature à impacter directement à hauteur de 3,9 % l’enveloppe du Programme d’Options Spécifiques à l’Éloignement et à l’insularité (POSEIDOM) qui, on le sait, constitue la déclinaison de la PAC pour les régions Ultrapériphériques (les RUP).

Sur les vingt huit États membres de L’UNION EUROPÉENNE, trois d’entre eux sont évidemment concernés : la France pour la GUADELOUPE, la GUYANE, la MARTINIQUE, la RÉUNION, SAINT-MARTIN et SAINT-BARTHELEMY ; L’Espagne pour LES ILES CANARIES et le PORTUGAL pour les AÇORES et MADERE. La France n’a d’ailleurs pas manqué d’exprimer sans délai son opposition à un tel projet de nature à affecter les dispositifs mis en œuvre par Le TRAITÉ DE L’UNION à l’égard des RUP.

De leur côté, les  professionnels de l’Agriculture et de l’Agro-alimentaire des Régions

concernés n’ont pas, comme on le sait, hésité à s’organiser pour manifester leur inquiétude ainsi que leur colère face aux institutions européennes à BRUXELLES les 25 et 26 juin derniers, avec l’accompagnement de Parlementaires et sous la conduite d’EURODOM attaché depuis des années à veiller, au cœur même de la capitale Belge, à la prise en compte des particularismes ultramarins par les institutions communautaires.

Cette démarche a été naturellement d’une réelle opportunité pour faire ressortir que les réductions budgétaires envisagées ne répondaient pas aux engagements pris par l’UNION EUROPÉENNE pour promouvoir l’Agriculture qui constitue pour les RUP un véritable moteur de développement endogène assurant la production autant que l’exportation.

Faut-il souligner que c’est grâce au POSEI que les grandes filières de ce secteur ont pu évoluer et continuer à se développer : la filière élevage qui porte aujourd’hui de grands projets pour son expansion ; la canne que les planteurs ne peuvent produire et exploiter qu’à partir des aides actuelles notamment sur le plan du transport, une production qui contribue à faire vivre la seule unité industrielle en marche sur la Martinique qu’est l’usine du Galion ; la banane actuellement plébiscitée à son plus haut niveau à l’international et la seule à répondre aux critères de qualité prescrits par l’UE ; le Rhum qui bénéficie du Label AOC et qui s’exporte de plus en plus répondant de ce fait à de nouveaux marchés.

Il ne saurait dès lors être question de porter atteinte à la restructuration de ces filières dont la nécessité s’impose indiscutablement. Il importe, en conséquence que l’Agriculture continue à être soutenue afin qu’elle puisse survivre et être restructurée en raison de son impact tant sur la production que sur la consommation ; il va de soi que toute baisse du Programme d’aides européennes à ce secteur d’activité s’avère inacceptable compte tenu des graves conséquences qui en résulteraient pour l’expansion de la production, la sécurité alimentaire et les activités liées à l’exploitation.

Il n’est pas vain de rappeler à cet égard que le POSEI destiné aux Régions Ultrapériphériques Françaises, Espagnoles et Portugaises a été enclenché au début des années 1990 à l’heure de l’entrée en vigueur du Traité de MAASTRICHT qui institue l’UNION EUROPÉENNE, instaure une citoyenneté européenne et évoque pour la première fois, dans une annexe au Traité, l’appartenance de ces Régions à la Communauté Européenne.

Il a fallu malgré tout attendre la signature du Traité d’AMSTERDAM entré en vigueur en 1999 et qui révise le Traité de MAASTRICH pour que les RUP soient intégrées dans le corps du traité de l’UNION EUROPÉENNE à travers son article 299. Nul doute que cette disposition constituait pour ces Régions une avancée considérable en ce quelle consacrait après les hésitations initiales leur pleine intégration à l’EUROPE tout en reconnaissant la prise en compte de leurs « caractéristiques et contraintes particulières »,d’où la possibilité d’arrêter pour elles sur une base juridique claire des mesures spécifiques liées notamment à l’éloignement et à l’insularité. Ceci étant, l’ultime étape pour les RUP interviendra le 13 décembre 2007, date à laquelle les chefs d’Etat et de Gouvernement des 27 pays membres de l’UNION parviennent à signer un accord aboutissant au Traité LISBONNE qui se présente sous la forme d’une série d’amendements aux Traités précédents.

Il était enfin retenu de ne plus présenter les Régions Ultrapériphériques en visant la catégorie générique « des Départements Français d’Outre Mer » mais de recourir au contraire à une déclinaison nominative. Le Traité simplifié intègre alors désormais une réelle énumération en mentionnant pour la première fois, à travers ses articles 349 et 355, la GUADELOUPE, la GUYANE, la MARTINIQUE et la RÉUNION mais encore SAINT MARTIN et SAINT BATRHELEMY prenant en compte leur évolution statutaire telle qu’elle résulte de la loi organique de février 2007, chacune de ces communes étant devenue une Collectivité d’Outre mer au sens de l’article 74 de la Constitution Française.

Au-delà de cette déclinaison rassurante, l’article 349 du Traité de LISBONNE reconnait deux objectifs pour l’EU :

  • prendre en considération les caractéristiques et contraintes qui pèsent sur ces Régions du fait de leur Ultra-périphéricité : l’exigüité du Territoire, l’étroitesse du marché intérieur, l’éloignement des Centres d’approvisionnement et des grands marchés ainsi que les surcouts qui en résultent, le relief et le climat difficiles, la dépendance économique a un certain nombre de produits.
  • Consacrer la possibilité d’arrêter à leur égard des mesures spécifiques : les politiques douanières et commerciales, les zones franches, les politiques dans les domaines de l’Agriculture et de la Pêche, les conditions d’approvisionnement en matières premières et biens de consommation de première nécessité, les aides d’Etat, les conditions d’accès aux Fonds structurels de L’UE.

Concrètement l’article 349 du Traité de LISBONNE qui apparait pour la première fois dans le corps du Traité de l’UNION EUROPÉENNE a pour vocation de fonder pour les RUP des dérogations à toutes les politiques communes, à travers une base juridique ferme et stable.

C’est la raison pour laquelle il convient plus que jamais de veiller au maintien des dotations du POSEI compte tenu du rôle incontournable qui est le leur pour l’ensemble de nos filières agricoles qui expriment des besoins dans un monde qui s’ouvre au quotidien. Il va de soit que la vigilance s’impose en pareille circonstance, quand bien  même la remarquable pression organisée récemment à BRUXELLES par les agriculteurs et la détermination des responsables politiques semblent avoir infléchi la position des Commissaires Européens afin que soit maintenue l’enveloppe du POSEI en son actuelle dimension.

Cela est d’autant plus important que la Commission européenne avait annoncé cette baisse du budget de la PAC pour la programmation 2021-2027 en raison du retrait de la GRANDE BRETAGNE et par conséquent de la disparition de sa contribution, comme de la réorientation de ses objectifs vers le changement climatique et la sécurité, alors même que certaines perspectives annoncent déjà pour cette période une hausse du budget de L’UNION EUROPEENE à travers les fonds européens de développement (s’agissant

notamment de la Défense et de la Politique migratoire).Il s’y ajoute que, depuis des années, le budget de la PAC ne semble plus être  la priorité  pour la majorité des Etats de l’UE alors que l’avenir de l’Agriculture est à tout jamais majeur car elle va demeurer pour longtemps l’investissement le plus précieux pour lutter contre la pauvreté et assurer la croissance.

L’occasion nous est donc donnée d’appeler fermement l’attention des Gouvernements  des Etats Membres sur le fait que les Régions Ultrapériphériques, par leur situation géographie et leurs spécificités, méritent sur la durée un regard, des moyens  et des dispositifs particuliers qui, du reste, suscitent « un retour sur investissement »  ce qui est le cas du POSEI.

Confrontés à la réalité du quotidien, nous ne saurions hésiter à nous prononcer et à nous positionner pour la reconnaissance d’une politique de cohésion territoriale qui respecte la diversité des Territoires et garantisse pour les RUP la pérennité des Aides appelées à compenser les handicaps structurels autrement dit invariables qui les affectent.

Le développement durable, générateur de croissance et d’emploi dans la sécurité, pour lequel l’Union Européenne a mis en œuvre de grands objectifs dans la droite ligne du principe de subsidiarité, n’exige-t-il pas des mesures appropriées et stables sur la base d’un statut d’accompagnement spécifique en lieu en place de mesures ponctuelles, évolutives et aléatoires !

Nul ne saurait pourtant ignorer ce principe fort exprimé dans l’arrêt WAGNER de la cour de justice Européenne en janvier 1983 déjà : « Une discrimination consiste à traiter de façon différente des situations qui sont identiques et à traiter de façon identique des situations différentes ».

L’heure est bel et bien venue, les Assises des Outre-mer nous offre d’ailleurs l’opportunité, de mettre l’accent sur la rigidité du Cadre communautaire dont relèvent les Régions Ultrapériphériques de l’UE à travers les articles 349 et 355 du Traité de LISBONNE, articles qu’il convient de reconnaître et d’appliquer comme étant pour elles le Droit commun et non des dispositifs a adapter aux circonstances afin qu’elles ne dérangent pas les intérêts de l’UNION EUROPÉENNE

Alfred ALMONT
Membre titulaire du Comité des Régions
De L’UNION EUROPÉENNE (2002-2010)

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